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La passagère du France

La passagère du France

Titel: La passagère du France
Autoren: Bernadette Pecassou-Camebrac
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Vint alors le moment tant attendu.
    Le commandant se leva et demanda le silence. Il annonça la valse et tous les officiers se levèrent. Pierre Vercors repoussa sa chaise et se leva lui aussi. Sophie avait baissé la tête en un mouvement de timidité qui ne lui ressemblait pas. Elle attendait la phrase magique :
    — Mademoiselle, m’accorderez-vous cette danse ? Ça y est, se dit-elle. Il va parler. Une valse avec cet officier, c’était loin de ce qu’elle avait imaginé comme première approche et sans doute pas ce qu’elle aurait choisi, mais pour se retrouver dans ses bras elle aurait dansé n’importe quoi. Seulement, la demande de l’officier ne venait pas. Au bout d’une minute qui lui parut une éternité, elle releva la tête. Il n’était plus là. Il avait quitté la table et il s’inclinait devant Jackie Kennedy. Sophie en eut le souffle coupé.
    — Et voilà, lui glissa Béatrice, amère, en désignant le couple qui prenait place sur la piste de danse. Une star ou une femme de Président, et ils nous oublient. Tous les mêmes !
    À la table voisine, le commissaire était au moins aussi surpris que Béatrice et Sophie. La valse des officiers était une chose très codifiée. C’était le commandant qui devait inviter la Première Dame des États-Unis. En aucun cas l’officier Vercors. Que diable était-il allé raconter au commandant pour obtenir qu’il lui laisse la place ? Le commissaire soupira. Il ne comprendrait jamais ce que ce dernier avait à toujours accepter les lubies de Vercors. Aussi, la valse se terminant, quelle ne fut pas sa surprise de voir l’officier s’avancer vers lui avec sa prestigieuse cavalière. Que se passait-il ?
    — Vos officiers valsent si bien, commissaire, dit Jackie Kennedy, que ma tête tourne un peu. À moins que ce ne soit votre Champagne. Je crois que nous sommes nombreux à l’avoir apprécié. Peut-être un peu trop. Je crois savoir que vous avez la chance d’être en charge de la sécurité sur ce magnifique paquebot...
    Déstabilisé, le commissaire ne comprenait pas où elle voulait en venir. Il acquiesça avec un petit rire qui se voulait respectueux,
    — Nous pardonnerez-vous ce petit excès ? demanda-t-elle innocemment avec son étonnante voix de petite fille.
    Mais que voulait-elle à la fin ? Il répondit très aimablement.
    — On n’apprécie jamais assez le Champagne, madame, et je vous remercie au contraire de rendre hommage à notre art de vivre.
    — Je ne doutais pas de votre compréhension, commissaire, ajouta-t-elle tout en posant sa main gantée de blanc sur son bras. Il aurait été dommage qu’un excès de Champagne gâche la fête de ce premier voyage du France. Aucun excès de Champagne ne mérite de se faire réprimander en pareille occasion. Absolument rien ne doit ternir ce premier voyage, n’est-ce pas ?
    Le commissaire esquissa une grimace qui se voulait un sourire. Il venait de comprendre. Vercors était allé inviter Jackie Kennedy pour la sensibiliser à l’affaire des marins. Comment diable avait-il pu faire une chose pareille ? Ça n’était ni son genre ni ses manières de se mêler de ces histoires, le commissaire en savait quelque chose. Alors pourquoi changeait-il d’attitude au point d’y mêler une personnalité aussi en vue ? Qui avait pu lui fourrer dans la tête une idée aussi saugrenue ? En tout cas, le commissaire notait qu’il avait réussi son coup, la Première Dame s’était laissé convaincre.
    — Le prestige de l’uniforme ! conclut le commissaire. Ce Vercors nous arrange tous les coups, mais à sa façon. Pas très réglementaire tout ça, décidément le commandant a raison quand il dit qu’il n’est pas tout à fait comme les autres.
    — Je compte sur vous, commissaire, dit Jackie Kennedy en s’éloignant vers la table du commandant.
    Le commissaire la regarda s’éloigner avec l’officier.
    Quelle soirée ! Un véritable casse-tête. Il décida de réfléchir. Tout d’abord, au début du dîner, Vercors lui avait annoncé qu’Andrei était parti en pleine nuit et qu’on ne le reverrait pas. Des marins qui quittent leur navire, le commissaire en avait déjà connu. Il y en avait toujours eu et il y en aurait encore. Il décida donc qu’il réglerait ce premier point avec les autorités portuaires le moment venu. Il se dit aussi que puisque c’était Andrei qui créait le plus de problèmes avec le syndicat, ce n’était pas si mal qu’il soit parti.
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