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La grande Chasse

La grande Chasse

Titel: La grande Chasse
Autoren: Heinz Knoke
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I
Enfance et jeunesse
    Tout le monde connaît la légende du « Charmeur de rats » qui débarrassa du fléau la petite ville de Hameln et qui, frustré de la récompense promise, entraîna tous les enfants dans les profondeurs du mont Koppen.
    Aujourd'hui encore, la rue qui vit cet exode tragique s'appelle la rue Koppen. Une voie étroite, mal pavée, bordée de maisons affreuses aux cours noires et lépreuses. Poussiéreuse en été, boueuse à l'époque des pluies printanières et automnales, elle se couvre, au plus fort de l'hiver, d'une bonne couche de neige, pour la plus grande joie des gosses du quartier. Très longue, elle traverse un faubourg embryonnaire pour se perdre insensiblement au milieu des jardins qui s'étagent sur les premières pentes du mont Koppen.
    C'était dans cette rue que je passais mon enfance. A ma crinière flamboyante et mes innombrables taches de rousseur, je devais être plutôt laid. Mais je m'en moquais, éperdument.
    Mon père était alors adjudant à la 10e compagnie du 18e régiment d'infanterie. Bel homme et excellent soldat, il conservait l'estime générale même quand, après la première guerre mondiale, il entra comme brigadier dans la police municipale.
    En 1914, il gagna la Croix de Fer sur les champs de bataille des Flandres. En 1915, il fut fait prisonnier devant Ypres. Pendant quatre ans, il végéta au camp de Belle-ile. En 1919, rentré à Hameln, il épousa Anna, la plus jolie et la plus frêle des filles du maçon et charpentier Märtens. Anna avait hérité de son père un entêtement peu ordinaire et une bonne dose d'humour. Aujourd'hui encore, sous le double bandeau de ses cheveux blancs, ses yeux bleus brillent d'une gaieté combative.
    Un an et huit jours après le mariage, je vins au monde, au beau milieu de la nuit.
    Très vite, mes parents et les voisins se rendirent compte que je n'avais rien d'un enfant de chœur.
    Mon père me menait durement. Pour m'inculquer une discipline à la prussienne, il se servait surtout d'une longue courroie qui me labourait fréquemment et douloureusement les fesses. Adjudant de métier dans l'âme, il me traitait comme il devait traiter ses « bleus ». Je ne lui en voulais pas ; je savais qu'il m'aimait. Quant aux généreuses raclées dont il me gratifiait, elles étaient amplement justifiées.
    Mon terrain de jeu préféré était la caserne, avec sa vaste cour, ses écuries, ses interminables couloirs. A six ans, je savais nettoyer un fusil, et je connaissais la manoeuvre de la mise en batterie d'une mitrailleuse. Les soldats étaient pour moi de grands camarades, des copains épatants avec lesquels je m'amusais du matin au soir.
    Et les années s'écoulaient, paisibles et infiniment agréables. Les événements importants étaient rares dans notre petite ville, nichée au centre d'un cirque de montagnes boisées. La Weser, fleuve puissant aux eaux claires, déferlait sur les plans inclinés des deux barrages flanquant l'écluse, s'engouffrait dans les énormes conduites qui alimentaient le moulin établi dans l'île, portait des trains de péniches, des remorqueurs, des radeaux faits de troncs de sapin. A l'époque des vacances d'été, de nombreux autocars déversaient dans la vieille cité un flot de touristes venus de tous les coins du monde pour visiter les monuments historiques et humer l'atmosphère romantique des ruelles médiévales. Le dimanche, la musique militaire égrenait ses flonflons sous les tilleuls du jardin public, au bord du fleuve.
    Dans ce cadre reposant, je passais une enfance parfaitement heureuse.
    En 1931, je quittai l'école communale pour le lycée, un établissement vénérable par ses murs comme par ses traditions. Bien entendu, je ne cessai pas pour autant mes frasques de mauvais sujet. Comme ma réputation était déjà solidement établie, les professeurs ne s'attendaient guère à autre chose et me punissaient avec une extrême indulgence — presque en souriant. Un seul d'entre eux, le père Tribius, trouvait que je dépassais la mesure. C'était un homme charmant mais qui avait le tort — à mes yeux — d'enseigner les maths, la chimie et la biologie. Or, mes matières préférées étaient justement les langues, l'histoire et la philosophie. En outre, je faisais beaucoup de sport ; en 1937, je fus élu vice-président de notre club d'aviron. Et par-dessus le marché, je prenais, à la même époque, des leçons de danse. Si bien qu'il ne me restait vraiment pas beaucoup de temps
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