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La fête écarlate

La fête écarlate

Titel: La fête écarlate
Autoren: Pierre Naudin
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regarda le ciel. Bleu pâle. Ce beau temps durerait sans doute. Ne pas imaginer ce que serait demain…
    Demain ! Heurts des rochets sur les écus, hennissements des chevaux parfois plus furieux que les hommes… Hurlements des juges diseurs et du public… N’y pas songer !… Impossible… Cinq couloirs pour opposer et départager les médiocres. L’attente, lance haute… Mais de quel côté ? Côté Vienne ou côté cité ?… Que faisait Blandine ? Était-elle sur un banc, en face, auprès de sa mère ?
    Ogier soupira : la jouvencelle s’emparait d’autant plus aisément de son esprit qu’il était inactif… Sortirait-elle dans la rue ?
    Là-bas, Isabelle semblait se confesser à l’évêque.
    « Elle ne doit plus penser à moi, mais peut-être à cette femme qu’elle avait prise dans sa litière… La Clisson ?… Thierry s’impatiente. Nous n’assisterons pas aux vêpres. Ni à Saint-Léger ni à Saint-Pierre ni à Saint-Just et Saint-Martial !… Il fera ce qu’il voudra tandis que je verrai Blandine. »
    Aurait-il la hardiesse de la convaincre que… Que quoi ?
    Il y eut un scintillement au pied des tribunes : les sonneurs dressaient et embouchaient leurs longues trompettes. Le fracas des cuivres secoua l’assistance. Le Roi d’armes et deux hérauts montèrent l’escalier de l’échafaud central, suivis d’un homme vêtu de vert, coiffé d’un chaperon dont les cornettes battaient son dos comme des tresses.
    – Je ne l’ai jamais vu, celui-là… Qui est-il ?
    Olivier de Fontenay réclama le silence. Quand il l’eut obtenu, l’un des hérauts s’approcha du garde-corps, à la droite d’Isabelle, et hurla :
    – Monseigneur, chevaliers, écuyers, demain vous aurez la joute où la prouesse sera vendue et achetée au fer et à l’acier !
    Lancée par le frère du roi de France, une ovation salua ce préambule. Ogier regarda ces hommes dont la plupart croisaient les bras et bombaient la poitrine. Il en imagina certains à terre, remuant dans leurs mailles et leurs fers, incapables de se relever, tels de gros escarbots (6) retournés.
    Isabelle s’approcha du héraut et lui offrit, après quelques mots murmurés, un sourire. L’émotion passée, l’homme se rengorgea :
    – Oyez ! Oyez ! Oyez !… Le chevalier d’honneur auquel sera confié le couvre-chef de plaisance brodé par dame Radegonde Bochet, garni et papilloté d’or bien joliment, et qui s’appelle, comme chacun sait, la Merci des dames… le chevalier d’honneur choisi par notre reine, est messire Guy IV de Montléon, ici présent !
    Nouveaux cris. L’homme au chaperon vert agita ses mains sans obtenir le silence.
    – Qu’en pensez-vous, messire ?
    – Rien pour le moment.
    Guy de Montléon (7) assisterait aux joutes dans l’ambon central et au tournoi à cheval, dans la lice même. Il tiendrait une lance au bout de laquelle serait fixé le chapeau de dame Bochet. Si, pendant le tournoi, un chevalier était battu pour ses « démérites » et que les dames le jugeaient suffisamment châtié, elles feraient un signe à cet homme. Avec l’assentiment de la reine – qui ne pourrait ignorer ces désirs –, le couvre-chef papilloté d’or serait abaissé jusqu’à toucher le heaume de la victime, que nul désormais ne pourrait frapper.
    – Il me paraît bien hautain, Thierry, mais l’important c’est qu’il soit franc et prompt à servir les dames.
    – Moi, messire, pour tout vous dire, je n’aimerais pas me targuer (8) de lui, par crainte qu’il ne me trahisse pour un sourire de cette reine de trente deniers.
    Tandis qu’Isabelle se rasseyait dans un bruissement de voix admiratives, le héraut hurla :
    – Messires, vous lèverez la dextre en haut, vers les saints, et omniement (9) jurerez, par la foi et serment de vos corps et sur votre honneur, que nul d’entre vous ne sera perfide et déshonnête aux joutes de ce proche dimanche ; et pour ce qui est du tournoi de lundi, vous jurerez aussi par la foi de vos corps et sur votre honneur que nul d’entre vous ne frappera sciemment l’autre d’estoc, ni aussi depuis la ceinture en aval, de quelque façon que ce soit… ni celui dont le heaume serait tombé et resterait la tête découverte (10) …
    Avant que l’homme eût achevé, toutes les mains s’étaient levées. Et des cris éclatèrent, joyeux ou graves selon l’âge et le caractère de ceux qui les poussaient :
    – Oui ! Oui ! Oui !
    La cérémonie
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