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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale
Autoren: Michel Peyramaure
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L’eau est pour moi une
source de jouvence ; mes soucis, mes fatigues s’y dissolvent comme par
magie ; elle me détend, m’oblige à éprouver mes qualités physiques, favorise
réflexion et méditation. Je me baigne rarement seul, non par crainte d’une
faiblesse, mais parce que le plaisir qu’éprouvent ceux qui m’entourent, hommes,
femmes, enfants, en tenue d’Adam et d’Ève, fait ma joie. J’ai instauré une
règle stricte : que mes enfants apprennent à nager dès leur plus jeune
âge.
    Ce matin de mai, radieux après l’orage de la
veille, ajoutera sa chaleur et sa lumière à celles de l’eau et de la vapeur
qu’elle dégage. J’en attends le meilleur moment de ma journée.
    Avant de partir, je dis à Éginhard :
    — Tu vas avoir une tâche longue et
difficile, à l’image de ma vie. Tu arrangeras cette confidence à ta manière. Je
fais confiance au fin lettré que tu es. Mon souci de la vérité te choquera
peut-être, mais je n’y renoncerai pas. Tu devras mettre une sourdine aux flûtes
de la poésie, en évitant de donner à mes propos le ton de tes auteurs favoris,
Virgile ou Plutarque. À bon entendeur…

Première partie

1
Des cabanes dans les arbres

1
    Récit
de Charles
    Ma prime enfance
s’est déroulée dans les villas de mon père, le roi Pépin, dit « le
Bref », ces immenses domaines agricoles épars dans la Gaule, sous
l’autorité de ma mère, la reine Bertrade, dite « au long pied », ce
qui, révérence gardée, lui donnait une allure pataude. Je n’ai conservé que de
vagues souvenirs de ces temps. Ma mère m’assura que je prenais plaisir à
chevaucher des poulains, à garder les bœufs et à traire les brebis.
    Malgré mon jeune âge, mon père m’emmenait
parfois inspecter ses garnisons, comme s’il voulait me faire respirer très tôt
les odeurs de cuir, de sueur et de crottin de ses armées et m’imprégner des
rudes accents des guerriers francs aux moustaches rousses. C’est à eux que je
dois mon goût pour les armes, encore que je n’eusse pas eu beaucoup d’occasions
de mettre leurs leçons en pratique.
    Dans les résidences familiales, je me
comportais en petit prince mais j’avais toujours à mes sandales la crotte des
étables et la boue des chemins. J’avais pour compagnon de jeux, outre les
enfants des officiers et des intendants, mon frère Carloman, de huit ans mon
cadet.
    Des images paisibles mais confuses émergent de
cette époque lointaine. Mon père nous confiait, dans l’atmosphère quiète des scriptoria itinérants, à des moines pédants et rigoristes chargés de nous
apprendre le latin et les Évangiles. Mes aptitudes médiocres et mon peu de goût
pour les études me valaient, de sa part, selon ses humeurs, le fouet ou le
cachot avec jeûne forcé, au pain et à l’eau. Sans être un lettré, il était un
des rares personnages parmi nos proches, hormis les clercs, à savoir lire et
écrire correctement. Il lisait les auteurs anciens et commentait pour mon frère
et moi des lectures dont nous faisions peu de profit.
    C’est de mon père que je tiens ma passion
viscérale pour la chasse. Les forêts n’étaient jamais loin de ses domaines, ce
qui lui permettait d’assouvir ses goûts sans avoir à monter une expédition.
Courir la bête noble, le cerf de préférence, le servir après une intense
chevauchée à travers bois, me procurait une trouble volupté qui, plus tard,
égalait celle de l’amour.
    Aujourd’hui encore,
malgré l’âge et une santé précaire, je consacre à la chasse une bonne part de
mon temps libre, et j’en éprouve le même plaisir, d’autant que la forêt
Charbonnière et celle d’Ardenne sont à peu de distance d’Aix. Quels que soient
le temps et la saison, j’y passe des journées entières. J’ai failli renoncer à
ce plaisir, il y a peu, à la suite d’une chute de cheval qui m’a meurtri les
reins. Sévère avertissement du destin… Un jour viendra, sans tarder, où je
devrai y renoncer.
    L’image concrète que
je garde de mon père ne correspond pas, Dieu merci, à celles qu’a forgée la
légende, qui en a fait une sorte de nabot aussi large d’épaules que de taille.
Il est vrai qu’il était petit mais sans être un nain, et robuste sans être un
hercule capable, comme on l’a dit et répété, de trancher d’un seul coup d’épée
la tête du taureau et du lion qui s’acharnaient sur lui ! La vérité est
qu’au milieu de ses officiers, pour la plupart des
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