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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite
Autoren: Mireille Calmel
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Prologue
     
     
    Ce n’était pas à proprement parler de l’angoisse. Juste une oppression légère qu’il sentait descendre de sa poitrine jusqu’à ses mollets serrés contre les flancs de l’âne. Une de ces sensations qui vous tiennent parfois à la tombée de la nuit, lorsque la lune est ronde et pleine, voilée par intermittence d’une brume noire effilochée par la brise. L’impression que ces tours dont il distinguait la masse noire et imposante sur le roc, juste au bout du chemin, ne parviendraient pas à lui donner refuge.
    Alors, pour chasser cet absurde et ridicule frisson, l’abbé Barnabé traça un signe de croix sur son mantel, abaissa son capuchon et posa avec détermination le poing sur le poignard d’argent qu’il portait à la ceinture.
    Il se rassura du silence autour de lui, des deux murets dressés à hauteur d’homme sur cette portion de route, qui empêchaient les loups d’attaquer les voyageurs, puis il talonna sa monture fatiguée.
    –  C’est ici, messire.
    François de Chazeron, seigneur de Vollore et de Montguerlhe, glissa de son cheval, l’air bougon. Il n’avait pas desserré les dents depuis que le prévôt l’avait envoyé quérir en sa résidence de Vollore, au matin. Celui-ci, qui réglait pour le compte du seigneur les affaires de justice, n’insista pas et mit pied à terre à son tour. A quelques mètres d’eux, sur le chemin, deux moines s’affairaient en marmonnant, entourés d’une masse grossissante de badauds attirés par l’effrayante découverte.
    Le prévôt n’eut pas besoin de faire intervenir la petite troupe de soldats qui les escortait. L’allure impressionnante et arrogante du seigneur de ces lieux les dispersa, la mine rentrée, en prières.
    Le supérieur de l’abbaye du Moutier, Guillaume de Montboissier, les accueillit d’un signe de tête auquel François de Chazeron répondit sans plaisir. Les deux hommes étaient en froid depuis que le seigneur avait refusé à l’abbé les fonds nécessaires à la construction d’une nouvelle chapelle, qu’il avait qualifiée d’inutile et de prétentieuse. L’abbé lui en gardait rancune. L’affaire en était là.
    Désignant la forme avachie à même la terre battue, le prévôt constata, apitoyé :
    –  C’est le cinquième…
    –  Je sais compter, Huc ! coupa sèchement François de Chazeron en écartant du pied le linceul qui masquait pudiquement le cadavre.
    –  Un loup, de toute évidence, conclut-il.
    Huc de la Faye ne discuta pas. Le corps lacéré de coups de griffes, dont le regard vitreux avait gardé l’horreur, parlait de lui-même. Pourtant, il était perplexe. Aucun loup, il en avait la certitude, n’aurait pu franchir les murets érigés en toute hâte depuis la précédente agression, trois mois auparavant.
    –  Le connaît-on ? interrogea Chazeron.
    –  C’est un frère exorciste venu de Clermont, répondit Guillaume de Montboissier. Nous lui avions demandé d’enquêter sur ces crimes, mais il n’a, semble-t-il, guère eu plus de chance que son prédécesseur.
    François de Chazeron toisa le regard gris de l’abbé du Moutier sans l’infléchir pour autant.
    –  Vraiment ? ironisa-t-il, un sourire léger flottant sur ses lèvres minces.
    Huc de la Faye s’interposa :
    –  Vous ne pouvez ignorer la rumeur, messire. Elle s’est nourrie de ces étrangetés, et j’avoue être moi-même perplexe. Pourquoi uniquement des prêtres et chaque fois lorsque la lune est pleine ? J’avais compté sur ces murailles pour museler ces superstitions, elles ne font, par leur inefficacité, que les renforcer.
    –  Simple coïncidence, trancha François de Chazeron, visiblement agacé.
    –  Troublantes cependant, vous ne pouvez le nier, renchérit Guillaume.
    –  Allons, l’abbé, soyons sérieux…
    –  Regardez cet homme, messire de Chazeron, ordonna Guillaume en tendant le doigt vers le visage bouffi du défunt, regardez et dites-moi si les traits de cet être voué à chasser les démons n’indiquent pas la plus grande des frayeurs, celle d’avoir croisé Satan cette nuit !
    François de Chazeron s’attarda non sur le visage qu’on lui désignait avec insistance mais sur le poing fermé du cadavre. Une enjambée lui suffit pour l’atteindre et forcer les doigts à s’ouvrir. Ce qu’il découvrit lui arracha un cri de stupeur. Dans le creux de cette main aux ongles maculés de sang caillé, des poils de loup gris se mélangeaient à de
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