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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon
Autoren: Gérald Messadié
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départ, à la veille d’une vie de femme enfin accomplie, lui paraissait présager le sien. Pendant des jours et des semaines, les siens craignirent qu’elle ne survécût pas à sa fille.
    Mme de La Pagerie se rétablit, mais avec une lenteur extrême. Rose dut partager sa vie avec deux chagrins, la mort de sa soeur et l’absence muette de William.
    — N’écrit-il pas à sa mère ? Ne parle-t-il pas de moi ?
    Aux mines fausses de son père, Rose flaira qu’un complot se tramait.
    — Oubliez William, dit-il enfin.
    — Comment ?
    — Oubliez-le.
    — Mais votre promesse… ?
    — Pour entrer en possession du titre et des propriétés de son oncle, Lord Lovat, William doit épouser le parti désigné dans le testament de ce dernier.
    À tous les chagrins qui s’amoncelaient déjà s’ajoutèrent deux autres : elle avait perdu William et il avait préféré la fortune et la gloire à l’amour. Son père s’avisa du poids qu’il avait jeté sur le coeur de sa fille.
    — Ne tenez pas rigueur à William, ajouta-t-il. Il ne vous a pas oubliée, je le sais. Mais il est prisonnier de la volonté de ses parents. Il vous a écrit vingt lettres : sa mère ne vous les a pas remises.
    — Et vous le saviez ? s’écria-t-elle, scandalisée.
    — Je ne l’ai appris qu’il y a peu.
    — Mais c’est une traîtrise !
    — La volonté des parents est pareille à la raison d’État.
    Elle ne pleura pas. Elle comprit que son enfance et sa jeunesse étaient finies. Elle entrait dans le monde adulte, qui est celui du pouvoir et de la fortune et non de l’amour.
    La prédiction d’Euphémie lui revint en mémoire : « Un créole que vous aimez ne cesse de penser à vous. Vous ne l’épouserez jamais et vous tenterez même de lui sauver la vie. »
    — Soulagez-moi d’une part du chagrin que m’a causé la mort de ma fille Désirée, dit M. Tascher de La Pagerie.
    Ils se firent face.
    — Acceptez d’épouser l’homme auquel elle était destinée.
    — Mais il y a des années que je ne l’ai vu.
    — C’est un bon parti. Et il est très avenant.
    — Se souvient-il même de moi ?
    — À coup sûr. Son père en est d’accord. Ma soeur vous a décrite de la plus flatteuse manière.
    — Que ne proposez-vous pas Manette ?
    — J’y ai songé. Mais vous le savez bien, Rose, elle refuse de quitter son foyer. Et de surcroît, elle est bien jeune.
    C’était vrai, Manette était tombée malade à l’idée de quitter sa mère pour aller en France. Et elle avait à peine plus de onze ans. Mme de La Pagerie se désolait aussi d’abandonner déjà la cadette aux tourbillons de l’existence. Rose soupira. Elle avait perdu William, qu’importait désormais ! Refuserait-elle qu’une guerre s’engagerait entre elle et ses parents, sa mère l’accuserait de miner sa vie. Les parents de William avaient dicté sa destinée, ceux d’Alexandre de Beauharnais dictaient la sienne et elle était elle-même captive des siens.
    — Qu’il en soit donc ainsi, dit-elle.
    Deux lettres, l’une du marquis de Beauharnais, l’autre de son fils Alexandre, informèrent les parents de Rose de leur parfait accord avec l’arrivée de celle-ci en France. Le marquis, pour sa part, avait hâte de marier son fils cadet, car il se faisait vieux et s’inquiétait des décisions que prendraient à sa mort les tuteurs d’un garçon encore mineur, puisqu’il n’avait que dix-huit ans.
    La politique cependant retarda le projet : la France entra une fois de plus en guerre avec l’Angleterre, car elle soutenait les Américains dans leur rébellion contre l’hégémonie anglaise. Mais, en dépit des risques d’une traversée dans les vents d’automne et d’une rencontre avec des navires ennemis, M. Tascher ne voulut plus attendre. Quand Rose embarqua pour l’Europe avec son père, un feu Saint-Elme grésilla au sommet du grand mât. Le prodige attira la population sur les quais et les marins ne pouvaient en détacher les yeux. Était-ce un présage ? Mais de quoi ?
    La traversée fut affreuse à cause des tempêtes. Père et fille débarquèrent à Brest au bout de quatre semaines, le 8 octobre 1779. M. Tascher, épuisé, décida de surseoir à la suite du voyage et écrivit à sa soeur, à Noisy-le-Grand, qu’il était malade et n’irait pas plus avant. Mme Renaudin, alarmée, accourut ; elle était accompagnée d’Alexandre, car celui-ci était justement en garnison dans la ville, impatient
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