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Hamilcar, Le lion des sables

Hamilcar, Le lion des sables

Titel: Hamilcar, Le lion des sables
Autoren: Patrick Girard
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sourire narquois le rassura.
Visiblement, les deux hommes jouaient une partie serrée et n’en étaient qu’au
début. À ce stade, il n’apprendrait rien de très intéressant et risquait de
s’attirer les défaveurs du futur vainqueur de cette joute. Mieux valait donc s’esquiver.
Plus tard, il saurait et agirait en conséquence.
     
    ***
     
    — Carthalon,
je te remercie des paroles aimables que tu as eues pour les miens, attaqua
Hamilcar. Ta famille n’est pas moins illustre et je suis le premier à le
reconnaître. Mais venons-en au fait. Que me vaut l’honneur de ta visite ?
    — Tout
d’abord l’envie de te revoir après tant d’années.
    — Pour
cela, il suffisait de me rappeler à Carthage. Je crains moins les voyages que
toi. Si tu es venu, toi, c’est que le Sénat ne souhaitait pas me voir revenir
dans notre patrie. Il a préféré t’expédier au loin, sachant que je mesurerais à
sa juste valeur l’effort que tu as ainsi consenti.
    — Mon
ami, cesse de me transpercer le cœur par tes remarques ironiques. Il est vrai
que j’exècre les voyages. Quitter Carthage pour me rendre dans mes propriétés
du Beau Promontoire [5] m’est déjà un supplice. Autant te dire que ces longues journées
passées en mer m’ont été particulièrement pénibles. Le moindre craquement du
navire me faisait trembler de terreur. La nuit, je ne parvenais pas à trouver
le repos, à moins de m’enivrer. Combien de fois n’ai-je pas maudit mes chers
collègues qui ont trop peur de toi pour oser te rencontrer !
    — T’enivrer,
toi un sénateur ! Dois-je te rappeler la loi édictée par nos pères et
consignée sur les tablettes par le baal sofrim, le maître des scribes :
« Je n’autoriserais pas de mon suffrage la pratique de l’ivresse dans
cette cité ou pour cet individu, mais plus encore qu’à l’usage crétois ou
lacédémonien, je me rallierai à la loi de Carthage, d’après laquelle jamais
personne ne prend en campagne de boisson enivrante, mais pendant tout ce temps
on se réunit pour s’abreuver d’eau dans la ville, jamais esclave, homme ou
femme, ne prend de vin, ni les magistrats l’année de leur charge, et de même
les pilotes et les juges en activité ne prennent absolument de vin, ni
quiconque est convoqué pour donner son avis à une délibération de quelque
importance, ni personne pendant le jour, sauf pour cause d’entraînement ou de
maladie, ni davantage la nuit quand un homme ou une femme a l’intention de
procréer. »
    — Tu
connais bien nos lois, Hamilcar, y compris celles qui ne sont plus appliquées
depuis longtemps. Tu les connais bien puisque tu les transgresses sans cesse.
Peu importe ce que tu penses de mes beuveries à bord. Je ne méritais pas que
mes collègues m’infligent le supplice de ce voyage.
    — Tu
les as couverts de flatteries, ils ont pensé te manifester leur reconnaissance
en te confiant cette mission. Tu n’as que ce que tu mérites. Il y a quelques
années, pour te rendre important, tu ne cessais de clamer que tu me connaissais
mieux que quiconque. Ils t’ont cru.
    — Quand
tu sauras ce qui m’amène, tu plaisanteras moins.
    — Bon,
je sais déjà que tu n’as pas l’intention de me faire crucifier. Que puis-je redouter
de pire ?
    — Rome
s’inquiète.
    — La
belle affaire !
    — Tu
ne veux pas comprendre ce que je te dis.
    — Comprendre
quoi ?
    — Une
délégation romaine est venue à Carthage. Appius Lutatius Junius et Flavius
Marcianus Pullius en personne !
    Un rictus
déforma le visage sévère d’Hamilcar. Il connaissait les deux hommes pour les
avoir combattus en Sicile. Des êtres fourbes, sans parole, semant autour d’eux
la discorde et la corruption. Hamilcar devina ce qui s’était passé. Même le
plus bête de ses esclaves aurait été capable de faire de même. À leur arrivée
au port, les envoyés avaient été accueillis par un Carthalon ruisselant de
bonnes paroles et de compliments, invitant les Romains à loger chez lui, dans
sa luxueuse résidence de Mégara, et les assurant qu’il les mettrait en contact
avec les esprits les plus sages au sein du Sénat, les partisans de la paix et
de la bonne entente avec la cité de Romulus et Remus. Il avait dû tenir
minutieusement ses engagements, puisqu’il était là, se tortillant sur son
siège, ne sachant pas trop comment délivrer le message dont il était porteur.
    — En
personne ! Comme c’est intéressant, rétorqua Hamilcar. Eux
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