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Dernier acte à Palmyre

Dernier acte à Palmyre

Titel: Dernier acte à Palmyre
Autoren: Lindsey Davis
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même pas en mesure de payer le moindre pot-de-vin, ce qui peut s’avérer fatal dans notre métier.
    À chaque fois qu’Anacrites torchonnait une mission délicate, il savait que Vespasien m’enverrait réparer ses bévues – je ne lui coûtais pas cher. Mes nombreux succès ne pouvaient qu’exciter sa jalousie, et même si, en public, il se forçait à paraître toujours amical envers moi, je savais qu’il ne rêvait que d’une chose : me régler mon compte une fois pour toutes.
    Je gratifiai son envoyé de quelques conseils imagés sur un choix de carrière puis, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, pris la direction du palais d’un pas lourd, en me préparant pour une confrontation implacable.
    Le bureau d’Anacrites était à peu près de la taille du petit débarras de ma mère. Sous le règne de Vespasien, les espions ne bénéficiaient d’aucune considération ; il se moquait éperdument de savoir qui disait du mal de lui ou l’insultait. Le nouvel empereur s’était donné pour tâche de rebâtir Rome, et il était persuadé que cette œuvre à laquelle il se consacrait assiérait sa réputation, sans qu’il fût besoin de recourir à des tactiques terroristes.
    Sous ce régime libéral, Anacrites n’avait pas une position enviable. Il s’était équipé d’une chaise de bronze pliante, mais je ne l’en trouvai pas moins recroquevillé dans un coin de la pièce pour laisser de la place à son employé de bureau. Originaire de la Thrace, gras et mal foutu, ce dernier s’était enveloppé dans une tunique rouge qu’il avait dû voler pendant qu’elle séchait sur la rambarde d’un balcon. Ses grands pieds, chaussés de sandales inélégantes tachées d’huile et d’encre, occupaient la plus grande partie du sol. Vu la façon dont Anacrites était assis, ce scribouillard parvenait à donner l’impression que c’était lui la personne importante à laquelle les visiteurs devraient s’adresser.
    L’atmosphère de ce bureau n’était pas professionnelle. Il y flottait une odeur bizarre, mélange de térébenthine et de pain grillé refroidi. Éparpillés un peu partout, je vis des manuscrits froissés et des tablettes de cire qui, d’après moi, devaient être des notes de frais. Sans doute celles d’Anacrites lui-même et de ses sbires que Vespasien avait refusé de payer. La parcimonie de l’empereur était déjà devenue légendaire, et les espions manquent toujours de mesure quand ils cherchent à se faire rembourser leurs dépenses.
    Au moment où je pénétrai dans les lieux, le maître espion mâchouillait un stylet en observant rêveusement une mouche sur le mur. Dès qu’il m’aperçut, il se redressa et prit son air important. Il se frappa le genou avec une force qui arracha une grimace à l’employé. Et à moi aussi. Puis il se laissa aller en arrière comme si de rien n’était. Je fis un clin d’œil au gratte-papier en souriant. Tout en sachant pour quel salopard il travaillait, il osa me rendre mon sourire.
    Anacrites choisissait toujours ses tuniques dans des tons discrets d’ocre ou de chamois pour mieux se fondre dans son environnement, mais ses vêtements n’en avaient pas moins une coupe suggestive, et ses cheveux huilés étaient plaqués sur ses tempes d’une façon si précise qu’en le voyant, je sentais frémir mes poils du nez. Le soin apporté à son apparence indiquait à quel point il était imbu de sa petite personne et de son talent professionnel. Il savait parler en public et était capable d’abuser son monde avec grâce. Je ne fais jamais confiance aux hommes dont les ongles sont soigneusement manucurés et qui manipulent les mots.
    Mes bottes poussiéreuses heurtèrent un tas de parchemins.
    — C’est quoi, ça ? demandai-je d’un ton abrupt. Encore des accusations venimeuses contre des citoyens parfaitement honnêtes ?
    — Occupe-toi de tes affaires, Falco, et laisse-moi m’occuper des miennes.
    Son ton impliquait que ses affaires étaient importantes, urgentes, et passionnantes, tandis que mes objectifs et mes méthodes puaient autant qu’un baril de calamars pourris.
    — Avec le plus grand plaisir, acquiesçai-je. J’ai dû recevoir un message qui ne m’était pas adressé. Quelqu’un est venu me dire que tu avais besoin de moi…
    — C’est exact. Je t’ai envoyé chercher.
    Il fallait toujours qu’il s’adresse à moi comme s’il me donnait des ordres. J’ignorai l’insulte – provisoirement.
    Je glissai une
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