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Caïn et Abel

Caïn et Abel

Titel: Caïn et Abel
Autoren: Max Gallo
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    Moi qui vous parle, mon nom est Di Pasquale.
    Je suis commissaire de police principal à Paris, rattaché directement au ministre de l’Intérieur.
    Il y a quelques mois, j’avais reçu mission d’enquêter, en collaboration avec la police grecque, sur la mort de Paul Déméter, un universitaire de quarante-sept ans, titulaire de la chaire d’histoire du christianisme au Collège de France, dont on avait retrouvé le corps sur l’île de Patmos, à quelques pas de la grotte de l’Apocalypse.
     
    Je me suis rendu à Patmos. Je suis entré dans la grotte de l’Apocalypse.
    C’est là que l’apôtre Jean, condamné à l’exil par le pouvoir impérial de Rome, avait dicté ses prophéties à son disciple Prochoros.
    Dans la grotte, j’ai vu le rocher qui servait de pupitre à Prochoros et j’ai imaginé le scribe attentif à la parole du Maître, écrivant le troisième verset du chapitre premier de l’Apocalypse de Jean :
    « Magnifiques, celui qui lit et ceux qui entendent les paroles de cette prophétie et gardent ce qui y est écrit, car l’instant est proche. »
     
    « Votre compatriote a été égorgé comme un agneau », m’a dit le commissaire Vassilikos en m’accueillant à Skala, le port de Patmos.
    Il m’a invité à déjeuner et nous nous sommes installés à la terrasse d’un des restaurants que les frondaisons des platanes abritent du soleil.
     
    Vassilikos n’a répondu à aucune des questions que je lui posais, préférant me montrer, à l’horizon, les îles du Dodécanèse, dont la plus proche, Samos, la côte et les sommets d’Asie Mineure, tout en évoquant Thucydide, les empereurs romains qui, tels Néron et Domitien, déportèrent sur ces îles ceux qu’ils étaient las de livrer aux bêtes.
    L’apôtre Jean fut l’un de ces relégués.
    Patmos était ainsi devenu un lieu de rencontre, une sorte de cratère où brûlaient la foi intense, la passion mystique, mais aussi les hérésies.
    Là, Dieu était apparu à Jean et lui avait dit :
    « Ce que tu vois, écris-le dans un livre et envoie-le aux sept Églises. »
    J’ai interrompu Vassilikos et cité l’un des versets du chapitre premier qui fait écho à celui que Vassilikos venait d’énoncer :
    « Écris donc ce que tu as vu, ce qui est et ce qui va être après. »
    Le Grec m’a dévisagé, ne cherchant à cacher ni sa surprise, ni son irritation, ni même sa colère.
    Je lui avais volé ce qui lui appartenait en propre.
    « Comme un agneau… », a-t-il répété.
    Et, détournant la tête, parlant d’une voix sourde, lasse et méprisante, il a égrené tout ce qu’il savait sur Paul Déméter.
     
    Le Professeur, comme il l’appelait – « Déméter ? un nom allemand, n’est-ce pas ? » –, avait acheté une bergerie proche du monastère Haghios Ioannis Théologos, à deux kilomètres de la grotte de l’Apocalypse.
    Il vivait là trois ou quatre mois chaque année, travaillant à la bibliothèque du monastère, l’une des plus riches de Grèce. Il avait consulté des dizaines de manuscrits et sa maison était remplie de carnets de notes et de dossiers, son ordinateur bourré de centaines de pages.
    L’été, il recevait pendant plusieurs semaines des étudiants de nationalités différentes.
    La police avait répertorié cette dernière année un Grec, un Allemand, une Italienne, une Polonaise, un Espagnol, un Français. Ils ne se quittaient pas, se promenant ensemble, s’asseyant sous les oliviers, parlant à voix basse, parfois toute la nuit. Ils n’étaient jamais allés en pèlerinage à la grotte de l’Apocalypse, et ne descendaient que rarement au port de Skala. Ils s’y étaient néanmoins rendus pour accueillir un homme vêtu, comme un adolescent, d’un jean et d’une chemise de toile bleue. Mais il ne faisait pas illusion, malgré son chapeau de toile et son sac à dos. Ce septuagénaire était ridé comme une vieille femme, ses cheveux mi-longs encadraient un visage à la peau flasque, aux traits indécis. Sa silhouette était celle d’un homme las, comme affaissé sur lui-même, à l’estomac proéminent et aux membres grêles.
    Les étudiants et Paul Déméter, qui l’entouraient de prévenances, portant son sac, l’appelaient Platon et – mais avec affection – « le Vieux ».
     
    J’ai une nouvelle fois irrité Vassilikos en murmurant le nom du « Vieux » : Louis Veraghen.
    Les services de l’ambassade de France à Athènes m’avaient communiqué
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