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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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reçus alors 16 dollars par mois, ce qui me permit de vivre à merveille et libéré de tout souci.
    L’inflation terminée, je m’inscrivis, au printemps 1924, à la Haute École technique de Munich. Bien qu’y ayant séjourné jusqu’à l’été 1925, je ne pris pas garde à l’existence de Hitler qui, après sa libération, avait recommencé, au printemps 1925, à faire parler de lui. Dans mes lettres très détaillées de l’époque, je ne parlais que de mon travail, de mes veilles, de notre but commun : nous marier dans trois ou quatre ans.
    Pendant les vacances, nous faisions souvent, ma fiancée et moi-même, en compagnie de quelques étudiants, des courses dans les Alpes autrichiennes, allant de refuge en refuge. Les pénibles efforts de la montée nous donnaient le sentiment d’accomplir vraiment quelque chose. Parfois, avec une opiniâtreté caractéristique, jepersuadais mes compagnons de ne pas interrompre la course commencée et de braver les pires intempéries, même si les nuages devaient nous priver de la vue dont on jouit du haut d’un sommet.
    Nous vîmes souvent, du haut de ces montagnes, une couche de nuages d’un gris profond stagner sur la plaine lointaine. Sous ces nuages des hommes menaient, à notre idée, une vie sans joie. Nous pensions être bien au-dessus d’eux. Jeunes et quelque peu exaltés, nous étions convaincus que seuls des hommes de bien pouvaient venir se perdre dans les montagnes. Quand nous devions redescendre de nos hauteurs, pour plonger dans la vie normale du bas pays, il m’arrivait souvent d’être déconcerté par la frénésie de la vie dans les grandes villes.
    Cette « union avec la nature », nous la cherchions également au cours de nos promenades en canot pliant. Ce type d’excursion était encore nouveau à l’époque. Les cours d’eau n’étaient pas encore encombrés de bateaux de toutes sortes comme aujourd’hui. Dans le silence, nous descendions les fleuves et le soir, nous pouvions monter notre tente à l’endroit où le paysage était le plus beau. Ces promenades, sans presse ni hâte, nous donnaient cette portion de félicité qui avait été l’apanage de nos parents. Mon père entreprit encore, en 1885, à pied et en voiture à cheval, un voyage de Munich à Naples et retour. Plus tard, alors qu’il pouvait sillonner l’Europe avec son auto, il disait de cette randonnée qu’elle était « son plus beau souvenir de voyage ».
    Nombreux étaient ceux de notre génération qui cherchaient ce contact avec la nature. Il ne s’agissait pas seulement là d’une protestation romantique contre l’étroitesse de la vie bourgeoise ; nous fuyions aussi devant les exigences d’un monde toujours plus compliqué. Nous avions le sentiment qu’autour de nous le monde avait perdu son équilibre. Dans la nature, fleuves et montagnes nous faisaient toucher du doigt l’harmonie de la création. Plus les montagnes étaient vierges, plus les vallées étaient solitaires, et plus elles nous attiraient. Je ne faisais partie, bien sûr, d’aucun mouvement de jeunesse, puisque je ne pouvais y trouver l’isolement que je cherchais.
    A l’automne 1925, je m’inscrivis, avec un groupe d’étudiants en architecture munichois, à la Haute École technique de Berlin-Charlottenburg. J’avais décidé de suivre les cours du professeur Poelzig, mais il avait limité le nombre des participants à son séminaire. Comme je n’étais pas très doué pour le dessin, il ne m’accepta pas. De toute façon je doutais de devenir jamais un bon architecte et j’accueillis ce verdict sans surprise. Le semestre suivant le professeur Heinrich Tessenow fut nommé à Berlin. Défenseur de la petite ville et des méthodes artisanales, il réduisait son expression architecturale au strict minimum. « L’essentiel, disait-il, c’est d’en faire le moins possible. » J’écrivis aussitôt à ma fiancée : « Mon nouveau professeur est l’homme le plus éclairé et le plus remarquable que j’aie jamais rencontré. Il m’enthousiasme et je travaille avec ardeur. Il n’est pas moderne, et pourtant, en un certain sens, c’est le plus moderne de tous. Vu de l’extérieur, il est tout aussi effacé et a tout aussi peu d’imagination que moi, mais, malgré cela, ce qu’il construit possède une profonde vérité. Son intelligence aiguë fait peur. Je vais m’efforcer de passer dans un an dans sa classe magistrale et tenterai, l’année suivante, de
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