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Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
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il construisit de nombreux édifices dans ce style néo-classique alors à la mode. Malgré sa mort prématurée, il laissa une fortune qui suffit à pourvoir à l’éducation et à la formation de ses quatre fils. Mes deux grands-pères profitèrent, dans leur ascension sociale, des débuts de l’industrialisation que connut la deuxième moitié du XIX e  siècle. Mais peu nombreux furent ceux qui, bien que débutant dans la vie sous de meilleurs auspices, purent en tirer profit. La mère de mon père, qui très tôt déjà eut les cheveux blancs, m’inspirait dans ma jeunesse plus de respect que d’amour. Grave, ancrée dans une conception très simple de la vie et pourvue d’une énergie à toute épreuve, elle dominait son entourage.
     
    C’est un dimanche, le 19 mars 1905, à midi, que je vis le jour à Mannheim. Le tonnerre d’un orage de printemps couvrit, comme me le raconta souvent ma mère, les cloches carillonnantes de l’église du Christ, toute proche.
    Mon père était, depuis qu’il s’était, en 1892, à vingt-neuf ans, établi à son compte, l’un des architectes les plus demandés de Mannheim, cette ville industrielle badoise alors en plein développement. Il avait déjà acquis une fortune considérable lorsqu’en 1900 il épousa la fille d’un riche commerçant de Mayence.
    Le style grand-bourgeois de notre appartement, dans l’une des maisons qu’il avait fait construire à Mannheim, correspondait au succès et à la considération dont jouissaient mes parents. Un grand portail aux arabesques en fer forgé gardait l’entrée. C’était une maison imposante dans la cour de laquelle les automobiles pouvaient entrer. Elles s’arrêtaient devant un escalier à la mesure de cette maison richement décorée. Nous, les enfants, c’est-à-dire mes deux frères et moi, nous devions toutefois utiliser l’escalier de derrière. Sombre, étroit et raide, il débouchait très modestement sur un palier de service. Mais les enfants n’avaient rien à faire dans l’escalier principal recouvert de tapis.
    Notre royaume à nous, enfants, s’étendait dans la partie arrière de la maison et allait de nos chambres à coucher à la cuisine, vaste salle qu’il fallait longer pour pénétrer dans la partie élégante de cet appartement de quatorze pièces. On faisait passer les invités d’un vestibule décoré de meubles hollandais et d’une cheminée recouverte de précieuses faïences de Delft, dans une grande pièce tendue d’étoffes Empire et meublée à la française. Je conserve encore aujourd’hui un souvenir particulièrement vif du lustre de cristal, brillant de ses nombreuses bougies, et du jardin d’hiver, dont le mobilier avait été acheté par mon père à l’exposition universelle de Paris en 1900. Avec ses meubles indiens, richement ouvragés, ses rideaux brodés main et son divan recouvert d’un tapis, avec ses palmiers et ses plantes exotiques, il évoquait pour nous un monde étrange et mystérieux. C’est ici que mes parents prenaient leur petit-déjeuner et c’est ici que mon père nous préparait, à nous les enfants, des sandwiches au jambon de sa Westphalie natale. Le souvenir que j’ai de la pièce de séjour contiguë s’est estompé, mais la salle à manger lambrissée, de style néo-gothique, a conservé tout son charme. Plus de vingt personnes pouvaient prendre place à la table. C’est là qu’on fêta mon baptême, c’est là qu’aujourd’hui encore nos fêtes de famille ont lieu.
    Notre mère éprouvait joie et fierté à nous maintenir soigneusement dans le cercle des familles qui, à Mannheim, tenaient le haut du pavé. Il y avait certainement dans cette ville entre vingt et trente maisons pour mener un semblable train de vie, ni plus ni moins. Un personnel nombreux satisfaisait aux besoins de représentation. Mes parents employaient, en plus de la cuisinière, naturellement adorée des enfants, une fille de cuisine, une domestique, souvent aussi un domestique et toujours un chauffeur, ainsi qu’une bonne d’enfantscommise à notre garde. Les femmes portaient un petit bonnet blanc, une robe noire et un tablier blanc, le domestique, une livrée violette avec des boutons dorés, mais c’était le chauffeur qui était le plus magnifique.
    Mes parents firent tout pour que leurs enfants connussent une jeunesse belle et insouciante. Mais richesse et représentation, obligations sociales, train de maison considérable, bonne d’enfants et
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