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1942-Le jour se lève

1942-Le jour se lève

Titel: 1942-Le jour se lève
Autoren: Max Gallo
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1.
    C’est le jeudi 1 er  janvier 1942.
    Ce jour-là, point de trêve.
    Les flammes de la guerre devenue mondiale en 1941 dévorent, comme
chaque jour, des dizaines de milliers d’hommes, de femmes, d’enfants.
    On massacre dans les ghettos de Pologne, d’Ukraine, des pays
baltes.
    On déporte, on gaze dans des camions gigantesques, stationnés
dans les clairières des forêts d’Europe centrale et de Russie.
    On abat les Juifs d’une balle dans la nuque. Et les corps
sont précipités dans des fosses communes et recouverts d’une mince couche de
terre, qu’un bras parfois perce, dans un ultime sursaut de vie.
     

     
    Dans le ghetto de Vilna, un adolescent de quatorze ans écrit :
    « J’ai le sentiment que nous sommes pareils à des
moutons. On nous massacre par millions et nous sommes démunis. L’ennemi est
fort, rusé, il nous extermine conformément à un plan et nous sommes découragés. »
     
    Mais dans le même ghetto de Vilna, un poète de vingt-trois
ans, Abba Kovner, rassemble cent cinquante jeunes gens, sous couvert de fêter
le nouvel an, et il lit le Manifeste qu’il a rédigé et qui est le
premier appel à une résistance juive armée.
    « Nous n’allons pas nous laisser conduire comme des
moutons à l’abattoir, dit-il. Il est vrai que nous sommes faibles et démunis, mais
la seule réponse au meurtrier est la révolte ! Frères ! Mieux vaut
combattre en hommes libres que de vivre à la merci des meurtriers. Levez-vous !
Levez-vous, jusqu’à votre dernier souffle.
    « L’espoir est encore vivace car on n’imagine pas que
1942 puisse être pire que cette année 1941, la plus atroce pour nous, atroce
pour tout ce que nous avons dû endurer réellement nous-mêmes, plus atroce
encore à cause de la menace permanente, la plus atroce de toutes du fait de ce
que d’autres ont subi, dont nous sommes les témoins (évacuations, assassinats),
mais cette fin d’année nous apporte confiance. »
     
    Les armées allemandes n’ont pas réussi à prendre Moscou ni
Leningrad. Elles ont dû reculer devant la contre-offensive soviétique lancée en
décembre 1941 pour écarter la menace sur Moscou.
    « Pour la première fois dans cette campagne de Russie, note
un officier allemand dans son journal, nous avons dû battre en retraite. »
    Mais les Allemands s’accrochent au terrain – ordre du
Führer, Haltbefehl  – et ils tiennent parce qu’ils savent que
reculant encore, ils connaîtraient le sort de l’armée napoléonienne.
    Ils font de chaque isba un fortin. Ils résistent aux assauts
des « Sibériens » – ces soldats bien équipés venus de Sibérie.
    Ils savent que le froid, les tempêtes de neige, les
blizzards seraient aussi meurtriers que les Russes.
     
    Mais c’en est fini de la Wehrmacht qui était entrée le 22 juin
1941 en Russie, sûre de sa force.
    « Nos soldats sont devenus de froids techniciens de la
mort, maîtrisant leurs armes avec lucidité et raffinement, écrit un officier. Ils
savent comment tenir au chaud leurs mitrailleuses afin qu’elles aient un
rendement maximum, et qu’elles éventrent ces vagues d’assaut russes qui s’élancent
en criant “Hourra, Hourra”. Ils n’ont plus d’états d’âme quant à la mort des
autres. Ce qui reste d’humanité dans leur cœur est réservé aux camarades… Ils
se protègent comme ils peuvent du froid. Ils ressemblent plutôt à une bande
hétéroclite composée de clochards qu’à une armée en campagne. »
    Et dès qu’ils ont brisé une vague d’assaut, ils se
précipitent pour dépouiller les cadavres russes de leurs bottes de feutre, de
leurs manteaux fourrés, de leurs chapkas à oreillettes, de leurs gants.
     
    Mais les pertes allemandes creusent des sillons de sang dans
les régiments.
    Et dans toute l’Europe occupée, en ce premier jour de l’année
1942, on s’en réjouit.
    « Nous regardons les ambulances et les convois
militaires qui filent à l’ouest. Ils sont chargés de soldats blessés et gelés. Le
plus souvent, les gelures touchent les mains, les pieds, les oreilles, le nez
et le sexe… »
    Ce témoin, un Juif polonais, ajoute : « Beaucoup
de gens meurent, mais tous ceux qui sont encore en vie sont certains que l’heure
de la vengeance et de la victoire sonnera pour nous. »
    Ils imaginent qu’en ce début d’année 1942, la situation de l’armée
allemande est désespérée :
    « Bienvenue à toi, 1942, s’écrie une femme du ghetto de
Vilna.
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